La réaction à notre lettre ouverte à la rédaction de l’édition en ligne du journal La Libre n’a pas tardé. Mais elle est confondante de lâcheté.
« Comprendre, c’est déjà agir ». Manifestement, les responsables de l’édition en ligne de La Libre ont eu à coeur d’appliquer à la lettre leur devise. Ils ont compris qu’ils avaient fait une bourde, et très rapidement agi. Aujourd’hui, l’article que j’incriminais hier sur ce blog a été retiré du site.
Voilà qui réduit à néant certaines conjectures émises par les internautes. Voulant donner à La Libre le bénéfice du doute, ils avaient avancé l’idée que La Libre gardait en ligne l’article et les commentaires ironiques sur sa source dans un but pédagogique. Il aura manifestement suffi que ma lettre ouverte circule sur la toile pour que ces belles intentions soient réduites à néant, sans bien sûr le moindre courriel à mon intention.
Pas de surprise
En soi, cette réaction ne me surprend guère. Je n’accordais guère de foi à la théorie de la « valeur éducative ». D’autant que le site de la Dernière Heure, journal appartenant au même groupe de presse que La Libre, qui avait été le premier à publier l’article incriminé, s’était lui aussi empressé de le retirer après qu’un internaute l’ait raillé sur Facebook. Bien entendu, je déplore que la rédaction de La Libre en ligne n’ait pas eu le courage d’assumer ses bourdes. Après tout, l’erreur est humaine. Mais voilà, ces bourdes sont aussi symptomatiques de la réalité des rédactions en ligne en Belgique.
Pas le temps, pas le temps
Les journalistes web ont le sort le moins enviable de toute la profession. Ceux que j’ai interrogés se plaignent d’être constamment sous pression pour sortir de nouvelles infos et actualiser au plus vite leur site. Quand les nouvelles qu’ils publient émanent des différentes agences de presse, le risque de bourde est rare, puisque ces dernières effectuent la plupart du temps un véritable travail journalistique avant de diffuser une information. Mais lorsque ces brèves sont rédigées à l’initiative du journaliste ou de son rédacteur en chef, c’est la porte ouverte à toutes les dérives: pressé par le temps et les impératifs de productivité qu’on lui impose, le journaliste n’a guère le temps – ou l’envie, m’a avoué une source anonyme – de procéder aux recoupements indispensables. Résultat: des bourdes comme celle-ci, et, beaucoup plus souvent, une syntaxe et une orthographe pour le moins approximatives.
Politique de l’autruche
Le problème est patent. Expliquerait-il le malaise de la rédaction de La Libre en ligne, manifestement peu pressée de reconnaître ses erreurs? Une chose est sûre: ce n’est pas en pratiquant la politique de l’autruche que les rédactions en ligne trouveront une solution. À titre pédagogique, et jusqu’à ce que La Libre daigne me répondre, je publie ci-dessous un screenshot de l’article désormais retiré de leur site (merci Google).
Cher Monsieur,
Je trouve très maladroit de la part d’un professeur en communication d’utiliser une seule erreur journalistique d’un éditeur web comme preuve du déclin de la presse belge. Le web n’est pas la presse belge, et encore moins un article de l’un de ses sites d’infos.
Par ailleurs, vous le reconnaissez vous-même, l’éditeur a repris un article d’un collègue du même groupe de presse. Cet article n’est resté sur le site que 32 minutes! Il a ensuite été retiré, mais restait consultable dans les archives… le temps de la vérification de l’info suite aux doutes émis par d’autres éditeurs et lecteurs. L’autre erreur, que je reconnais et assume, c’est d’avoir oublié de supprimer totalement cet article par la suite.
Cela dit, contrairement à votre post mensuel volontairement aggressif, nous publions près de 200 articles par jour de 5h
Cela dit, via Twitter, vous nous aviez déjà insulté en utilisant des termes bien peu académiques et journalistiques. Vous savez qu’il est possible d’échanger vos points de vue de manière civilisée et constructive?
Bàv,
Dorian
Dorian de Meeûs
Mon analyse:
Au-delà des inévitables attaques ad hominem, je ne décèle dans cette missive aucune réponse aux deux questions présentes en filigrane dans mes deux posts:
– Comment une telle bourde a-t-elle pu arriver? – Pourquoi choisir d’effacer subrepticement le texte et d’ignorer ma lettre ouverte? Manifestement, La Libre ignore les termes « effet Streisand ».
Je note aussi – avec plaisir – que La Libre semble avoir relevé les différentes remarques postées sur Twitter pour relever des erreurs de syntaxe et d’orthographe sur leur site. C’est une bonne nouvelle. Mais contrairement à d’autres journaux en ligne, je n’ai jamais reçu de réponse de leur part. Ceci est la première reconnaissance « officielle » de la réception de mes remarques. Un grand contraste avec l’attitude adoptée par certains de leurs concurrents que j’ai également étrillés par le passé, et qui m’ont écrit pour me remercier d’avoir relevé les erreurs et m’assurer de leur correction imminente.