Amis futurs pensionnés, je vous le dis tout net: cette mesurette ne changera rien à l’inéluctable destin des pensions à la belge. Si vous avez moins de cinquante ans, vous ne toucherez jamais le moindre cent de pension. Vous voulez savoir pourquoi? C’est par ici…

Declining chartVous vous rappelez de Bernard Madoff ? Si si, vous vous rappelez. Madoff, c’est le vilain méchant de Wall Street qui a été condamné à 150 ans de prison pour avoir créé un schéma de Ponzi dont mêmes d’illustres banques furent les victimes.  Au moins, lui, il a été puni. Alors que les arsouilles qui ont créé le système belge de pension par répartition courent toujours. Et que de génération en génération, les politiciens le perpétuent alors qu’ils savent pertinemment de quoi il retourne. Et eux, ils n’iront jamais en prison. Mieux: ils se sont construit leur propre plan de pension qui, lui, échappe au pot commun et leur garantit une retraite dorée. Même Raoul Hedebouw, qu’on n’a pas encore entendu refuser sa future plantureuse pension de parlementaire. Mais revenons à nos moutons.

Nos pensions, une arnaque à la Madoff?

Quel rapport, donc, entre l’arnaque de cette ordure de financier ricain et notre beau système de sécurité sociale que le monde nous envie ? Facile, tous deux reposent sur le même mécanisme: celui des schémas de Ponzi. Pour ceux qui débarqueraient, un schéma de Ponzi, ça consiste à promettre un investissement super rentable à une bande de gogos. Le principe est simple : l’arnaqueur garantit aux gogos un return à deux chiffres sur leur investissement. Ils investissent leurs sous, et parlent du placement à leurs copains. L’escroc utilise ces premières mises pour payer des intérêts pharamineux. Du coup, les premiers gogos continuent à en parler autour d’eux, et de nouveaux gogos investissent. Leur argent sert à rémunérer les précédents – et à payer à l’arnaqueur quelques villas en Espagne – il paraît que c’est les soldes sur l’immobilier ibérique en ce moment. Tant qu’il y a de nouveaux gogos pour investir, l’arnaque peut tranquillement continuer. En fait, ça ne s’arrête que si le flux de nouveaux gogo se tarit. C’est à ce moment-là que l’arnaque pyramidale éclate. Toute la sagesse, pour l’escroc, consiste à mettre les voiles avant.

OK, mais quel rapport avec nos pensions?

La pension par répartition fonctionne sur le principe suivant. Tous les travailleurs ont droit à une pension. À cet effet, chaque mois, une partie des cotisations sociales qu’ils paient et que leur employeur paie sont consacrées au système de pensions. Jusque là, rien d’anormal, me direz-vous. À un détail près: ces cotisations ne servent pas à épargner pour leurs vieux jours, mais à payer les pensions des gens qui ont investi avant nous dans le schéma: ceux qui sont déjà pensionnés et ceux qui vont bientôt l’être. Utiliser les investissements des nouveaux venus pour payer le rendement des anciens, ça ne vous rappelle rien?

Ah merde! Mais pourquoi ça va se casser la figure?

Et bien, comme tous les schémas de Ponzi, l’arnaque des pensions par répartition peut continuer tant qu’il y a suffisamment de gogos qui entrent dans le système. Sauf que là, on a un méga problème: depuis la fin du baby boom (grosso modo depuis le milieu des années 60), il y a de moins en moins de gens qui naissent dans notre pays. Et donc de moins en moins de gogos dans le système. Et là, depuis cinq ans, les premiers bébés du baby-boom ont commencé à prendre leur retraite. C’est le « papy boom ». Plus de gens qui veulent leurs sous, moins de gens qui raquent: le schéma de Ponzi est en train de craquer aux coutures.

La pension à 67 ans: pourquoi?

Oui mais si on relève l’âge de la pension, ça va aller, non?

Ben non. Le vieillissement de la population est un phénomène inéluctable et n’est pas prêt de s’arrêter. Sauf si on se met tous à faire plein d’enfants, parce que là, le taux de fécondité de la population belge est de 1,79 enfant par femme. Tous les spécialistes s’accordent pour dire qu’il faut 2,1 enfants par femme juste pour maintenir la population dans son état actuel. Toujours moins de jeunes, toujours plus de personnes âgées. Qui en plus meurent de plus en plus tard, et donc perçoivent une pension de plus en plus longtemps. Alors relever l’âge de la pension à 67 ans, ça va juste acheter quelques années (pour les optimistes) ou quelques mois (pour les pessimistes) avant l’implosion du système.

Mais pourquoi nos politiciens ne font rien ?

Parce que « faire quelque chose de réellement efficace », à ce stade-ci, ça signifie sortir de la logique de répartition. Et ça, ça va faire mal. Il va falloir expliquer aux gens que leur pension pour laquelle ils ont cotisé toute leur vie, ils peuvent s’asseoir dessus. Il va falloir trouver des solutions pour faire la transition vers un système par capitalisation, le seul capable d’assurer une retraite décente à tout le monde. Mais ça va demander d’investir beaucoup d’argent. Et où le trouver, cet argent? Bref, aucun politicien depuis plus de quarante ans n’a le courage de dire ou d’expliquer cela. Tous refilent la patate chaude au gouvernement suivant en croisant les doigts pour que l’implosion n’arrive pas durant leur mandat. Je pense que le gouvernement Michel-Peeters-De Wever y échappera. Mais pas leurs successeurs. Le système implosera en principe dans moins de dix ans, m’a un jour confié un informateur anonyme très bien renseigné.

Voilà. C’est dit. Et si vous voulez plus de chiffres, jetez un oeil au bouquin que Ludovic Delory et moi avons publié il y a trois ans dans l’indifférence générale. Vous y apprendrez aussi pourquoi Elio Di Rupo, Charles Michel, Raoul Hedebouw, Jacky Morael et Bart De Wever se foutent de l’éclatement du système: leur pension de parlementaire ne dépend pas de la sécurité sociale, mais d’un fonds d’investissement mis sur pied par les différents Parlements.

Bienvenue dans la réalité.